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jeudi 18 décembre 2014

l'amitié et l'amour

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Parfois, il suffit d’un silence, d’un regard d’incompréhension ou même d’un mot pour signer la fin d’une amitié. Pour Théo, 37 ans, ce fut ce « bonnes vacances » lancé par Julie, proche depuis douze ans, alors qu’il venait de lui annoncer la mort de son chien et compagnon de vie. « À ses yeux, c’était un objet qui tombait en panne. Aux miens, c’était un deuil. Non seulement elle n’a montré aucune empathie, mais elle a ainsi révélé à quel point elle ne me connaissait pas et méprisait mon attachement à cet animal. » Pour d’autres, la trahison prendra le visage de l’ami qui n’est pas venu lorsqu’ils avaient besoin de soutien, de celle qui a séduit son compagnon, de celui qui a menti ou révélé un secret...
« La trahison est bien plus violente qu’une simple déception, éclaire Valérie Blanco, psychanalyste. Trahir signifie manquer de foi envers quelqu’un, ne pas être fidèle à une parole donnée. Or, la parole de l’autre nous dit qui nous sommes, nous donne une place dans le monde. » La trahison atteint notre identité d’autant plus fortement qu’elle touche l’amitié, qui nous donne dès l’enfance un étayage narcissique indispensable. Non seulement l’amitié nous confirme que nous existons, puisque nous comptons pour quelqu’un, mais elle nous prouve aussi ce dont nous ne sommes jamais assurés : que nous sommes aimables. « Comme tout mouvement d’amour, elle est faite d’un aller-retour : je m’aime à travers l’autre, j’aime qu’il m’aime et qu’il me renvoie une belle image de moi, développe la psychanalyste. Selon Lacan, l’amitié repose en outre sur un rapport du pareil au même. Nous sommes amis avec celui ou celle qui nous ressemble, un alter ego. L’autre est un miroir, un double idéal, où je reconnais ma propre image. » La psychanalyste Nicole Fabre ajoute : « Ce regard sur nous est nourrissant, réconfortant, il enrichit l’image que nous avons de nous-mêmes. Plus que celui de nos parents, puisque l’ami ne nous est pas donné : nous l’avons conquis. »

Les trahisons


Si nous en croyons Aristote, l’ami est aussi celui qui nous rend meilleurs, qui nous permet de développer des talents ou des qualités jusque-là insoupçonnés. Lorsque le miroir se brise, nous avons l’impression de perdre un peu de nous-mêmes. Hélène, 37 ans, a ainsi vécu une forte amitié de dix ans avec une femme, son ancienne mentor : « J’étais stagiaire, de six ans sa cadette. Son aura me fascinait. J’avais besoin d’être rassurée, soutenue, reconnue. Elle m’a apporté cela. Petit à petit, nous sommes devenues intimes et complices intellectuellement. Ensemble, nous avions plein d’idées, nous avons écrit des livres, créé une entreprise. Lorsqu’elle m’a trahie, je me suis effondrée : je me sentais nulle, je n’avais pas été à la hauteur de nos projets, j’avais démérité. » La blessure narcissique de la trahison amicale est alors si profonde, si violente, qu’elle impose un premier temps de retour à soi afin d’y voir plus clair. Seul, avec l’aide de son entourage ou d’un thérapeute. « Surtout, ne pas se précipiter à prétendre que ce n’est pas grave, que c’est oublié, immédiatement pardonné », avertit Nicole Fabre, car le refoulé pourrait ensuite resurgir à un moment inadapté. « Je crois bon de prendre son temps, de respecter la profondeur de notre souffrance, de notre colère, de notre regret », reprend-elle. De nous demander ce qui nous a blessés : est-ce la trahison de cet ami ? Ou est-ce aussi le fait qu’elle s’ajoute à d’autres, vécues en famille ou avec des proches ?

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